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Témoignage de Mario et Felicidad

jeudi 27 mars 2014, par Anne Courrèges

Mario et Felicidad forment un couple de volontaires attachant et impliqué. Ils s’attachent ici à partager leur expérience et à retranscrire les ressentis et réflexions des enfants qu’ils ont accompagnés. Ce témoignage nous éclaire ainsi sur la réalité de la vie quotidienne des enfants et sur ce que représente pour eux le bibliobus.

Cela fait plus de 20 ans que nous vivons à la campagne, et durant tout ce temps, nous n’avons écrit que quelques cartes à notre famille, ou de temps en temps, les comptes-rendus des assemblées communautaires. C’est donc notre première expérience d’écriture d’un témoignage, qui vient relater notre -également- première expérience en tant que volontaires pour le Bibliobus.
Membres d’un syndicat paysan, nous y sommes chargés de renforcer l’éducation au sein de notre communauté. Nous recherchons à ce titre, en ville, toute alternative qui pourrait nous inspirer. C’est comme cela que nous avons rencontré Anne puis l’équipe du Bibliobus. Curieux de vivre l’expérience « du dedans », nous avons rejoint l’équipe du bibliobus par une chaude après-midi mais avons été vite soulagés par la douce fraîcheur de nouvelles rencontres : Adela, Hans, Rocío…
A notre arrivée dans un quartier retiré de Quillacollo, nous avons été interpellés par la “corne de brume” qu’a fait sonner Ramiro pour annoncer aux enfants notre arrivée. Nous avons été encore plus surpris quand, au coin de la rue, nous vîmes plusieurs enfants accourir pour former une file disciplinée, chacun attendant son tour pour se laver les mains. D’autres, dès l’arrêt du bus, se sont précipités pour installer les tables en plastique. Ils avaient l’air de savoir parfaitement que faire et comment. Nous nous sommes donc contentés de les observer et de les aider occasionnellement.
Durant les trois heures qui ont suivi, nous avons eu la chance de partager avec les petits garçons et filles du quartier, essayant de les aider dans les activités de la journée : dessiner et peindre de petits cadeaux pour leur maman. Ce qui nous a plus, c’est l’enthousiasme, la joie et la concentration de quelques instants qu’a montré une grande majorité des enfants. Ainsi que les commentaires qu’ils faisaient lorsqu’ils « travaillaient ». La volonté et la responsabilité de l’équipe du projet nous a aussi beaucoup touché.
Les deux jeudis suivants, déjà plus acclimatés, nous commençons à entamer un vrai dialogue avec certaines des petites filles bénéficiaires, qui ne veulent rater pour rien au monde leur rendez-vous hebdomadaire avec le Bibliobus. Elles aiment y lire, dessiner, peindre… Yolanda par exemple, doit venir avec son petit frère âgé d’un an, dont elle prend soin pendant que ses parents travaillent. Elle a dû lutter, comme ses petites camarades, pour obtenir la permission parentale de rejoindre le bibliobus. Lidia quant à elle, arrive toujours en retard car elle est scolarisée le matin et doit à son retour de l’école faire les travaux ménagers, en tant que fille aînée de la famille. Roberto pour sa part nous a confié « Je ne savais ni lire ni dessiner. Aujourd’hui je peux. Je vais continuer à venir n’est ce pas ? »
Najeli et sa petite soeur lisent et dessinent, absorbées. Elles ont presque fini leur tâche quand la plus petite s’exclame :
- “Ahhhh ! Les moutons, nous ne sommes pas allés les voir !”
- “T’inquiètes !, je les ai attachés dans le champ de la tante » répondit Najeli sans arrêter de dessiner. Et le soupir de soulagement de la plus petite nous revint en tête de retour chez nous. Nous nous sommes mis à penser que peut-être, l’idée d’offrir une éducation en dehors des obligations scolaires paraissait de moins en moins scandaleuse.
Ces expériences nous ont en tout cas convaincu du travail du Bibliobus pour l’éducation des enfants, ce qui nous a enchantés. Et nous sommes persuadés que s’il pouvait passer dans notre communauté, nos enfants profiteraient aussi avec bonheur de ce cadeau.

Mario et Feli (mai 2011)